
« Je suis issu d’un milieu assez modeste où on a l’habitude de réparer les choses, de les réutiliser… » D’emblée, Quentin Tavenier avertit : qu’on ne lui reproche pas de surfer sur la vague du surcyclage(1) ; chez lui, c’est une tradition familiale. Des chutes de parquet massif issues de sa maison auto-construite, il fait des planches à découper. Dans de vieux draps récupérés chez sa grand-mère ou des tissus chinés ici et là, il crée des accessoires pour bébé. « Recycler les matières consomme beaucoup d’énergie et de ressources, alors que les réutiliser permet de leur donner une seconde vie sans les détruire », explique-t-il. Photographe de formation, il a appris sur le tas, se remémorant les gestes méticuleux de son grand-père, qu’il a passé des heures à observer dans sa menuiserie. De son atelier à lui sortent aujourd’hui d’élégants objets de bois usuels ou de décoration, des enseignes pour professionnels, des accessoires textiles et même des photographies. Un Numéro vingt-cinq à suivre, assurément !
(1) – Ou upcycling : activité consistant à réutiliser des objets hors d’usage pour les transformer en leur donnant une valeur ajoutée.
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Créations éthiques
Dans son atelier Numéro 25, situé à Valencisse (Molineuf), Quentin Tavenier manipule aussi bien la défonceuse à bois que la machine à coudre pour donner vie à des objets créés uniquement à partir de matières récupérées. Une façon, pour ce jeune artisan créateur, de lutter à sa manière contre la surconsommation.


À la naissance de sa fille, Quentin Tavenier a demandé une machine à coudre pour son anniversaire. Une idée qui a tellement étonné sa famille que personne ne lui a offert. Alors il se l’est achetée lui-même. Pourtant, Quentin n’y voyait rien de plus qu’un outil aussi pratique que sa perceuse mais à l’usage de vêtements usés. Réparer plutôt que jeter, une habitude familiale dont le jeune papa tout juste trentenaire a hérité et qu’il revendique haut et fort contre le consumérisme à outrance.
Ce sont finalement quelques vieux draps dénichés dans l’armoire de sa grand-mère qui lui donnent le goût de la création couture : il y réalise les premiers accessoires pour sa fille avant de développer une gamme plus complète, au vu du succès rencontré par ses pièces auprès des proches. Pas question pour autant de parcourir les boutiques de tissus neufs, même issus de matières recyclées. Quentin est catégorique : « Le recyclage par la destruction de la matière nécessite beaucoup d’énergie. Donner une seconde vie aux matières, quelles qu’elles soient, est plus écologique. » Il parcourt donc les brocantes, puces de couturières et autres recycleries pour chiner ses tissus.



Le bois, un matériau facile à récupérer
Enfant, le petit Tavenier ne faisait pourtant pas montre d’un talent particulier pour les activités manuelles. Mais le petit-fils de menuisier et futur photographe pouvait passer des heures à observer les mains de son grand-père qui s’activaient savamment à l’atelier. « Je n’ai jamais pratiqué avec mon grand-père, mais sa logique manuelle me fascinait ! » Au point, bien des années plus tard, de se lancer dans la construction d’une maison en bois avec sa compagne. Novice, Quentin découvre une matière qui le fascine, le bois. C’est dans les planches restantes de son parquet massif qu’il commence à découper des objets, d’abord des planches de cuisine puis d’autres objets utiles ou de décoration.
L’artisan recycleur apprécie d’autant plus la matière bois qu’elle est « facile à récupérer car on en trouve partout. Il y a même un aspect social très intéressant car depuis que je me suis mis à la travailler, des voisins, des amis, des connaissances viennent me proposer leurs chutes. » Pour autant, le créateur refuse de détruire des objets encore utilisables. « Si ma première exigence est de donner une seconde vie à la matière, la seconde est de ne le faire qu’à partir d’objets inutilisables. Jamais je ne détruirai un meuble en bon état pour en récupérer les morceaux. Tant qu’il peut servir comme tel, il doit être conservé. »
Semer des graines où ça ne s’y prête pas
Plutôt que de ne cibler qu’une clientèle aisée acquise à la cause environnementale, Quentin Tavenier préfère réaliser des pièces simples aux tarifs abordables. C’est dans cet esprit qu’il a accepté de participer à une boutique éphémère, tout ce mois de mars, avec sept confrères et consœurs au centre commercial Auchan à Vineuil. Outre leurs créations, les artisans y animeront des ateliers gratuits. « C’est une façon de semer des graines dans un lieu qui ne s’y prête pas du tout. Si les habitués des centres commerciaux découvrent qu’ils peuvent fabriquer les choses eux-mêmes et qu’ils peuvent acheter des objets de qualité plutôt que du plastique, ils changeront peut-être leurs habitudes. »

Alice Enaudeau
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