De l’Écosse à la Sologne
Noir, c’est noir ! De la pointe du mufle à celle des sabots et jusqu’à la langue, sans oublier le poil, le noir est de mise pour la race bovine d’origine écossaise, l’Aberdeen Angus. Autres particularités, l’animal naît sans corne et est doté d’un caractère doux par nature. « Avec une autre race, je ne pénétrerais jamais au sein d’un troupeau s’il y a un taureau… sauf si j’étais sûr de courir plus vite que lui ! » s’amuse Franck Baechler, éleveur, qui vient justement de faire des papouilles au spécimen d’environ 800 ou 900 kg de muscles qui veille sur un cheptel composé d’une dizaine de mères et de jeunes. « Il est adorable ! »
Conseiller agricole pendant plus de quinze ans dans le département pour la chambre d’agriculture, Franck a franchi le pas de l’installation en 2018. « La crise de la quarantaine ! Il me tardait d’appliquer tout ce que je disais aux agriculteurs. » Sur 70 ha, au lieu-dit Le Gault, à Dhuizon, il développe une agriculture de conservation appelée aussi régénérative. « Elle se définit précisément par le non travail du sol, le restockage de carbone pour redonner de la fertilité au sol. Le carbone, c’est de la matière organique ! Si vous faites tout cela en remettant des animaux dans le cycle d’exploitatio., vous entrez dans un système vertueux. »
Évolution de la biodiversité
La reproduction, comme le développement des animaux, se fait à son rythme. Toute l’année dehors, le troupeau d’Angus évolue sur prairies ou sur couverts végétaux, notamment en sorgho fourrager. « Je ne passe pas par la case ensilage, qui ne convient pas à mon système d’exploitation. »
Franck mesure « sans arrêt l’évolution de la biodiversité sur la ferme. En cinq ans, j’ai multiplié par 10 le nombre de vers de terre. » Le comptage des insectes a confirmé la présence de 15 espèces de bousiers (dont un carabe, identifié pour la première fois en Loir-et-Cher). « Ce sont eux qui contribuent aussi à redonner du vivant au sol. L’animal, en l’occurrence le ruminant, amène son cortège de biodiversité. » Sur la ferme, d’autres animaux évoluent : la brebis de race Sologne et, bientôt, des poulets fermiers feront, eux aussi, leur entrée. Pour l’éleveur, « la production de viande va bien au-delà d’une simple production. Mon objectif : rééduquer les gens à manger en pleine conscience. Sans avoir la prétention de faire la meilleure viande du monde, mais d’être le meilleur dans l’agroécosystème global. » Autre intérêt ? « L’agriculture régénérative améliore la valeur du foncier. Un territoire qui ne rend pas son terroir comestible est un territoire transparent, sans identité ! »
Capucine Beauchamp