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Le conseil départemental, acteur majeur de la biodiversité

Le Loir-et-Cher bénéficie d’un patrimoine naturel remarquable que le conseil départemental protège et valorise. Cela se traduit notamment par la préservation des 28 espaces naturels sensibles et par un engagement renforcé du département et de ses partenaires pour promouvoir ces sites d’exception. Il mène aussi de nombreuses actions auprès du public scolaire et multiplie les programmes pour protéger la nature aujourd’hui et demain.

Dossier réalisé par Julie Bind

Pascal Huguet
Pascal Huguet ©CD41/N. DERRÉ

Une question à Pascal Huguet, vice-président chargé de l’agriculture, de l’environnement, de la biodiversité, des espaces naturels sensibles, des associations environnementales, de la chasse et de la pêche.

Pascal Huguet : Le Loir-et-Cher possède d’innombrables paysages qui recèlent un patrimoine à mettre en valeur. Or, ce dernier est encore assez méconnu des Loir-et-Chériens. Le département et ses partenaires oeuvrent à le faire découvrir et à le préserver, en particulier dans les espaces naturels sensibles (ENS). Ces 28 sites, labellisés par nos soins, sont des lieux où la biodiversité et la géodiversité sont préservées et où le public peut être accueilli.

L’ACTION DU DÉPARTEMENT EN FAVEUR DES ESPACES NATURELS SENSIBLES

Des sites d’exception

Les espaces naturels sensibles (ENS) sont au coeur de la politique environnementale du conseil départemental. Cette compétence a été activée en Loir-et-Cher en 2009 par le schéma départemental des ENS et la reconnaissance, la même année, de 25 sites. La dénomination ENS n’est pas une protection, mais bien la labellisation d’un espace dont le caractère naturel est menacé ou en raison de la qualité particulière de sa faune, sa flore, son sol ou son sous-sol. Depuis 2009, trois sites supplémentaires bénéficient de ce label. Le département veille alors à la préservation de son patrimoine naturel et à l’accueil du public, en sachant que la loi autorise, si nécessaire, la restriction d’accueil. L’un des28 ENS n’est d’ailleurs pas ouvert au public, car il abrite la dernière population loir-et-chérienne de crapauds sonneurs à ventre jaune, qu’il convient de préserver.

Aide financière et technique

Le conseil départemental apporte une aide financière et technique aux communes et associations gestionnaires des ENS. En juin prochain, les élus du département seront appelés à voter un nouveau plan d’action (schéma des ENS) incluant des diagnostics écologiques récents, des objectifs revus face au bouleversement climatique (protection des zones humides…), des réflexions et partenariats actualisés, etc.

Les 27 ENS ouverts au public

GLOSSAIRE
ENS : espace naturel sensible.
RNN : réserve naturelle nationale.
CDPNE : comité départemental de la protection
de la nature et de l’environnement.
CREEDD : convention régionale d’éducation
à l’environnement et au développement durable.
RNR : réserve naturelle régionale.

Vallées de la Grand-Pierre et du Vitain.
Vallées de la Grand-Pierre et du Vitain. ©CD41/N. DERRÉ

Averdon et Marolles – Restaurer les prairies

Seule réserve naturelle nationale (RNN) de Loir-et-Cher, classée en 1979, la réserve des Vallées de la Grand-Pierre et du Vitain s’étend sur près de 300 ha. Le conseil départemental l’a labellisée ENS pour valoriser le territoire. Elle est gérée par le comité départemental de la protection de la nature et de l’environnement (CDPNE), missionné par l’État.
Le conseil départemental a acquis, en 2020, 130 ha de la vallée humide avec l’aide de subventions de l’Union européenne et de l’Agence de l’eau. Le département a restauré 8 ha de prairies afin de revenir à des marais herbacés à la place de la peupleraie abîmée ; 6 ha sont aujourd’hui entretenus par les vaches Highland d’un éleveur partenaire.
Le département réfléchit maintenant à la restauration écologique des 6 km de Cisse dont il est propriétaire sur la réserve. Cette acquisition a permis l’ouverture au public d’un sentier sur la réserve, pour le plus grand bonheur des amoureux de nature.

Les scolaires découvent le patrimoine naturel

Le conseil départemental souhaite favoriser l’éducation à l’environnement des scolaires, notamment des collégiens. Depuis 2020, il s’est engagé dans un dispositif d’appels à projets afin de sensibiliser les élèves de primaire et de collège aux thèmes du développement durable et de l’environnement. Une vingtaine de projets ont été financés pour les collèges cette année, dans le cadre de la convention régionale d’éducation à l’environnement et au développement durable (CREEDD).
Les établissements lauréats de l’appel à projets se voient offrir trois demi-journées avec un éducateur à l’environnement et la prise en charge de 80 % du prix du transport (pour aller voir un ENS ou un potager bio, par exemple).
Le département va plus loin en créant un nouvel outil qui sera mis en place cette année : le parrainage un collège/un ENS.

Angiana, 15 ans.
Angiana, 15 ans. ©CD41/N. DERRÉ

« Ce projet est passionnant »

Avec sa classe Ulis du collège de Saint-Laurent-Nouan, Angiana, 15 ans, mène des actions sur l’eau avec la Maison de la Loire. « Nous nous sommes déplacés au port du Cavereau. Nous avons fait une maquette de la Loire, de la source jusqu’à l’océan Atlantique, mesuré la vitesse de l’eau, prélevé de l’eau, mesuré sa température et son pH. Ce projet est passionnant. Il me permet de faire des expériences en sciences, m’apporte des connaissances et me fait découvrir ce fleuve et son histoire. J’ai retenu que l’eau pouvait être dangereusement polluée. Il faut la protéger, car sans elle, nous ne pouvons pas vivre. Quand je dis ”nous“, ce sont aussi les animaux, la végétation et la planète entière. Mes conseils seraient de ne pas la gaspiller ni la polluer avec des produits chimiques et de ne pas jeter ses déchets n’importe où. »


VALORISER LES ESPACES NATURELS SENSIBLES

La politique menée par le département concernant les ENS s’articule autour de deux axes : leur gestion (entretien, restauration, suivi naturaliste…) et leur valorisation. Sur les 28 ENS que compte le Loir-et-Cher, 23 sont accessibles en permanence, quatre le sont aux groupes. Le dernier, extrêmement sensible, n’est pas ouvert au public, car il abrite les derniers crapauds sonneurs à ventre jaune du département.

ENS Les Trois Chemins.
ENS Les Trois Chemins. ©CD41/A. CHARRON

Boursay – Les Trois Chemins

À Boursay, l’ENS Les Trois Chemins invite, sur le sentier des trognes, à découvrir les spécificités et les savoirs ancestraux du Perche : trognes, chemins creux, technique du plessage. Au départ du sentier, la Maison botanique accueille le public toute l’année et propose de nombreuses animations.

ENS des Lévrys.
ENS des Lévrys. ©CD41/N. DERRÉ

Nouan-le-Fuzelier – L’étang des Lévrys

À Nouan-le-Fuzelier, l’étang des Lévrys est un site communal sur lequel un sentier pédagogique de 3,3 km a été créé en partenariat avec Sologne Nature Environnement. Relié à l’application pour enfants Guidigo, il permet d’accueillir un public familial sur ses chemins très praticables.

Pontlevoy – La réserve naturelle régionale (RNR) géologique de Pontlevoy

RNR de Pontlevoy.
RNR de Pontlevoy. © CD41

Labellisée Tourisme et handicap, la RNR de Pontlevoy est adaptée au public en situation de handicap moteur (panneaux explicatifs à hauteur de fauteuil sur le sentier pédagogique, accès en calcaire…). C’est le seul site de la région où les quatre formations sédimentaires du miocène sont observables. Le circuit parcourt les temps géologiques, de l’aquitanien, il y a vingt-trois millions d’années, jusqu’à nos jours.

À la découverte des bryophytes

Scleropodium cespitans.
Scleropodium cespitans.
Southbya-nigrella.
Southbya-nigrella.
Plagiothecium nemorale.
Plagiothecium nemorale.

Depuis quatre ans, le département fait réaliser des études surla bryoflore (mousses et hépatiques) des ENS. Ces végétaux anciens jouent un rôle très important dans la régulation des eaux grâce à leur pouvoir absorbant. Très sensibles aux variations de l’environnement, les bryophytes agissent comme un thermomètre sur l’état de santé de leur lieu de vie. Des spécialistes ont déjà inventorié quatre sites : l’étang de Lévrys (Nouan-le-Fuzelier), la Grosse Pierre (Mareuil-sur-Cher), l’étang de Malzoné (Marcilly-en-Gault-Milançay) et le Chemin du vieux bocage du Perche (Le Temple-Sargé/Braye). Des espèces rares et menacées ont été découvertes.
©A. PLOUMAILLOUX


CONNAÎTRE ET GÉRER LES ESPACES NATURELS SENSIBLES

Le département s’attache à bien connaître les ENS afin de les gérer au mieux en s’adaptant à leurs spécificités biologiques.

Patrice Jobard.
Patrice Jobard. ©CD41/C. ANANIGUIAN

Valencisse – Un site pédagogique

L’ENS du Marais des Rinceaux, à Valencisse, accueille des élèves en découverte de la nature ou en chantier nature. Les ENS servent de support à la formation de futurs gestionnaires d’espaces naturels, comme les élèves de l’agro-campus des deux vallées de Vendôme, avec lequel le département a une convention. Les étudiants viennent travailler sur le site en échange d’une aide financière du département, qui intervient aussi en classe. Des élèves entretiennent la roselière (prairie dense de roseaux), abri notamment d’espèces d’oiseaux très spécifiques. Des classes de BTS, de bac professionnel et des collégiens viennent s’occuper du lieu, qui possède un batrachoduc pour le passage de la petite faune sous la route. « Depuis son classement ENS et son aménagement, le marais des Rinceaux attire les gens », dit Patrice Jobard, conseiller délégué à l’environnement et au développement durable. « Avant, c’était presque un dépotoir ; maintenant, il y a des sentiers sur pilotis et une mare.

Les panneaux explicatifs qui balisent le chemin ont été réalisés par le syndicat mixte du bassin de la Cisse et de ses affluents. Dix hectares de zone humide sont entretenus et valorisés. » L’IME (institut médico-éducatif) d’Herbault veille à l’état du grillage posé sur le sentier pour ne pas glisser. « Il remplace aussi les planches abîmées et gère une plante invasive, la renouée du Japon. » Le site est couvert par l’application Guidigo, très ludique pour les enfants.

Le Temple – Le paradis des coléoptères

Biphyllus lunatus.
Biphyllus lunatus.
Cardiophorus gramineus.
Cardiophorus gramineus.
Hypoganus inunctus.
Hypoganus inunctus.

Le circuit de l’ENS du Chemin du vieux bocage, sur la commune du Temple, propose une balade de 7,5 km au coeur des paysages percherons : collines, bocage et trognes. Préserver les jolies haies du Perche, c’est aussi protéger la biodiversité qu’elles abritent. Pendant deux ans, des spécialistes ont mené des études sur les coléoptères (scarabées, coccinelles…) et ont découvert plus de 1 000 espèces différentes, très rares. Ce site est l’un des plus peuplés de la région Centre-Val de Loire.
Une mare, favorable aux insectes et aux amphibiens, a été créée sur ce site afin de résoudre un problème de chemin inondé. Le chemin est maintenant restauré et la mare est spontanément devenue le domaine de grenouilles, libellules, etc. ©S. DAMOISEAU

Pruniers-en-Sologne – Restauration de lande sèche

ENS du Chênes, à Pruniers-en-Sologne.
ENS du Chênes, à Pruniers-en-Sologne. ©CD41

L’ENS Le Chêne, à Pruniers-en-Sologne, déploie sur 25 ha tous les milieux typiques de la Sologne. En 2021, la commune, avec l’appui technique du département et avec Sologne Nature Environnement (SNE), a lancé un chantier de restauration de la lande sèche, alors colonisée par des pins sur 1,4 ha. Pour permettre à la bruyère et à la callune de s’exprimer, les pins ont été coupés de deux façons (coupes mécanique et manuelle). Objectif : étudier leurs conséquences sur le sol et la végétation.
Des suivis sont réalisés sur la flore et la recolonisation de la bruyère, tout en gérant les fougères et l’invasif raisin d’Amérique. En parallèle, un suivi sur les papillons et sur les criquets et sauterelles est réalisé ; certaines espèces de ces insectes, dépendantes des landes, sont recherchées.

Ornella Schmidt Cortiana, éleveuse.
Ornella Schmidt Cortiana, éleveuse. ©CD41/C. CHIGOT

Depuis 2023, une clôture permet le pâturage des brebis solognotes sur une courte période pour réguler la croissance des fougères au profit de la bruyère. Ce projet est financé à 85 % par l’Office français de la biodiversité (OFB) dans le cadre du plan France Relance. Ornella Schmidt Cortiana, éleveuse, met gracieusement ses brebis solognotes à disposition. « Je suis ravie de participer à ce genre d’étude. Il faut trouver un juste milieu entre l’entretien du site et la quantité de nourriture laissée aux brebis. Il nous faut aussi ajuster la période où elles pâturent : au tout début de la pousse des fougères, quand elles sont encore tendres. » Cette année, l’expérience est prévue pour une quinzaine de jours entre mai et juin. « C’est un peu plus tôt que l’année dernière, on pourra voir la différence », explique Ornella.
Une partie du bois coupé pour restaurer la lande a été mise en tas pour créer des abris à la faune et des catiches (abris) pour les loutres à Villefranche-sur-Cher. SNE assure des animations grand public sur le site et un programme pédagogique avec l’école de Pruniers-en-Sologne.


PROTÉGER LA FAUNE ET LA FLORE

©CD41/N. DERRÉ

Inventaires des espèces protégées en bord de route

Très actif sur les ENS dont il gère, avec ses partenaires, la préservation, l’accueil du public, la valorisation, la connaissance, la gestion, etc., le service environnement du conseil départemental travaille également avec d’autres services et directions de la collectivité, comme la direction des routes et des mobilités. En effet, chacun a son rôle à jouer dans la préservation du patrimoine naturel.

Un diagnostic botanique est désormais réalisé avant les gros travaux en bord de route, tels que l’arasement ou le curage. Des biologistes du conservatoire botanique du bassin parisien viennent expertiser les zones concernées afin de repérer la présence d’espèces vulnérables, voire protégées. Ainsi informée, la direction des routes peut, selon les cas, modifier son calendrier des travaux ou son ingénierie (la plante est retirée avant l’intervention en bord de route et remise après).

Arbres & haies 41

Pour agir en faveur de la biodiversité et des paysages, le conseil départemental propose, depuis 2021, le programme « Arbres & haies 41 ». Celui-ci favorise la plantation d’arbres et de vergers sur le territoire et s’adresse à tous : particuliers, entreprises, associations, etc. Un dernier appel à projets s’est achevé fin mars. Pour l’heure (avant la prise en compte des nouvelles demandes), le bilan est positif : 78 projets ont été soutenus dans 49 communes ; 17,5 km de haies,1 426 arbres isolés et 216 m2 de bosquets sont concernés.
www.nature41.fr

Prairies41

En 2021, le conseil départemental et la chambre d’agriculture ont créé la plateforme Prairies41. L’objectif est simple : mettre en contact les propriétaires de prairies non exploitées (particuliers, entreprises, communes…) et les éleveurs à la recherche de pâture pour leurs troupeaux. C’est gratuit, accessible en ligne et simple d’utilisation. Cela permet de maintenir des élevages de proximité et évite la fermeture des paysages. Ce dispositif possède une réelle dimension écologique et durable.
prairies41@departement41.fr – www.prairies41.fr

Pollinisateurs : les abeilles et les autres

Le département est propriétaire de cinq ruchers. À Couffy, Herbault, Saint-Firmin-des-Prés et Sargé-sur-Braye, des apiculteurs du syndicat agricole gèrent les ruches, en récoltent le miel et assurent des animations. Le dernier rucher, installé à Yvoy-le-Marron, est géré par le conservatoire de l’abeille noire Sologne-Orléanais. Les récoltes de miel sont distribuées gratuitement à des collégiens lors d’événements autour de l’alimentation.
Le département a également créé des mallettes pédagogiques à destination des élèves de primaire et de collège afin de leur expliquer que les abeilles ne sont pas les seuls insectes pollinisateurs.
Objectif : faire découvrir le monde des insectes grâce à des maquettes, des fleurs, des filets, des guides… pour créer des espaces de biodiversité ou donner des idées d’aménagement de la cour d’école. Les élèves sont invités à aller en extérieur pour une expérience de science participative.

Ruchers du conseil départemental.
Ruchers du conseil départemental. ©CD41
Jeu de société pédagogique.
Jeu de société pédagogique. ©CD41/N. DERRÉ
Pipistrelle commune.
Pipistrelle commune. ©CD41/L. JOUVE

Chauves-souris : mieux les connaître, mieux les protéger

Indispensables et redoutables prédateurs, les chauves-souris régulent les insectes et dispersent les graines des plantes. Toutes leurs espèces sont protégées en France, car leur habitat se fragmente ou disparaît, ce qui entraîne une forte diminution de leurs populations. Il est fondamental de mettre en place des actions afin de maintenir leurs effectifs.
Depuis 2020, un plan départemental sur dix ans prévoit d’améliorer la connaissance de certains aspects de la vie de ces mammifères (reproduction, gîtes d’été de mise bas, gîtes d’hiver…) et de mieux préserver leurs refuges. En effet, les arbres, bâtiments et caves menacés d’abattage ou en travaux mettent en péril leur survie.
Le département a décidé d’être exemplaire : – en réalisant des diagnostics dans les bâtiments afin d’évaluer l’impact des travaux ; des mesures pour les réduire sont alors mises en oeuvre ; – en adaptant, si possible, les interventions sur les ponts lors de la présence de chauves-souris. Aujourd’hui, certains ponts sont fabriqués avec des gîtes intégrés à la structure de l’ouvrage.

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